Pour la quatrième fois en quatre ans (1), les associations d’élus locaux (2) ont réussi à élaborer un texte commun à l’occasion de leur rencontre en Avignon. Ce document présente le positionnement qu’elles sont prêtes à défendre d’une seule voix, malgré un contexte empreint d’inquiétude, avec, en toile de fond, de lourdes incertitudes quant à l’évolution du rôle du ministère de la Culture, la baisse des dotations de l’Etat et des budgets des collectivités, une réforme territoriale en cours dont les lignes ne cessent de bouger.
« L’heure est grave » – Autant de facteurs qui, pour certains élus et professionnels, font craindre le pire pour l’avenir des politiques culturelles locales. « L’heure est grave », a martelé Philippe Laurent, maire de Sceaux (Hauts-de-Seine), qui, la veille, avait quitté la présidence de la Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture (FNCC), en passant le relais à Florian Salazar Martin, adjoint au maire de Martigues (Bouches-du-Rhône).
Intitulé « arts, culture et territoires, le partage de l’interrogation, le courage de l’imagination », le document appelle les collectivités à mettre en commun leurs questionnements et à nourrir mutuellement leur réflexion. Il s’agit d’imaginer de « nouveaux territoires culturels », associant collectivités, porteurs de projets et professionnels, tout en préservant l’acquis des expériences réussies.
« Il faut se réveiller » a lancé Yves Ackermann, président du conseil général du Territoire de Belfort, plaidant pour le maintien du « formidable tissu social » et du « dynamisme » enrichi au fil des années par les politiques départementales.
Compétence obligatoire – Mais nul ne sait comment la réforme territoriale en cours va redessiner les contours de la compétence culturelle des différents types de collectivités. Sur ce point, Claudy Lebreton, président de l’Assemblée des départements de France (ADF), n’imagine pas d’autre voie que « le maintien de la clause de compétence générale telle quelle. » Et même « s’il y a à l’avenir un chef de filat à respecter, nous devrons y travailler tous ensemble. »
Or du côté de l’Association des régions de France (ARF), la question est désormais entendue : la réforme territoriale doit conférer aux régions une compétence culturelle « obligatoire ». C’est la position que Karine Gloanec-Maurin, vice-présidente de la région Centre et présidente de la commission culture de l’ARF a défendue devant les autres associations d’élus. Prudente, elle a parlé d’une « compétence obligatoire et partagée », concept qui a laissé dubitatifs plusieurs participants. « Nous devons inventer », leur a-t-elle répondu, faisant allusion à la déclaration commune des associations, qui invite les élus à « imaginer de nouveaux territoires culturels. »
Associations professionnelles – Pour sa part, Olivier Bianchi, maire de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme) et représentant de l’Association des maires des grandes villes de France (AMGVF) a, comme l’an passé, plaidé pour un dialogue plus régulier entre élus et professionnels de la culture. Message entendu par Florian Salazar-Martin, qui a précisé que la FNCC poursuivrait la démarche de conventionnement avec les associations professionnelles engagée par son prédécesseur (3).
Décalage – Sur les gradins de la cour du Cloître Saint-Louis, les représentants du Syndicat national des arts vivants (Synavi), de la Fédération nationale des arts de la rue, de maisons de la culture etc. ont lancé aux élus un « appel du pied que nous avons entendu », a souligné le nouveau président de la FNCC. La Coordination des fédérations d’associations culturelles et de communication (Cofac) a aussi manifesté sa volonté d’un dialogue approfondi, « pour faire respecter la biodiversité de la création et de la diffusion.»
Dans l’assistance, certains ont trouvé ces échanges quelque peu décalés, par rapport aux réalités sur le terrain. Comme Didier Salzgeber confodateur de l’Institut de coopération pour la culture : « L’urgence de la situation appelle des réponses très pratiques », a lancé aux élus l’animateur du réseau national des établissements publics de coopération culturelle (EPCC). Il a pointé un « décalage entre le calendrier du terrain et le texte cosigné par les élus ».
Une série de questions à poser ensemble
Droit à l’expérimentation des langages artistiques, articulation entre territoire et universalité, prise en compte de l’apport culturel de chacun, stratégie pour éviter l’instrumentalisation des artistes et des acteurs culturels, etc. Autant de problématiques qu’évoque le texte commun cosigné par les onze associations d’élus le 16 juillet 2014. Ces dernières affirment vouloir trouver des réponses, alors que « grondent les inquiétudes et émergent des tentations de repli. » Il s’agit de dépasser la seule référence territoriale, sur laquelle « la responsabilités culturelle politique (…) ne saurait (…) être entièrement indexée. » Pour les signataires, « il relève de l’intelligence politique d’imaginer de nouveaux territoires culturels et de s’engager dans des coopérations à la fois entre collectivités et avec les personnes en élaborant des projets et des dispositifs mêlant les savoir-faire professionnels et le dynamisme créateur de chacun ».
Thèmes abordés
Notes
Note 01 les associations d’élus ont déjà signé des textes communs sur les politiques culturelles en 2010, 2012 et 2013 Retour au texte
Note 02 Association des maires ruraux de France, Association des petites villes de France, Association des maires de France, Villes de France (ex Fédération des villes moyennes), Association des maires des grandes villes de France, Association Ville et Banlieue, Association des communautés de France, Association des communautés urbaines de France, Assemblée des départements de France, Association des régions de France, et Fédération nationale des collectivités territoriales pour la culture Retour au texte
Note 03 la FNCC a signé en 2013 une convention de partenariat avec le Syndicat national des scènes publiques et des discussions sont en cours avec le Syndicat national des entreprises artistiques et culturelles. Retour au texte